ALMA
Dans l’album de famille d’Alma on découvre une adolescente souriante, heureuse, presque angélique, avec de longs cheveux noirs hérités de ses ancêtres mayas.
Pourtant, très jeune, Alma a rejoint l’un des gangs les plus violents du Guatemala qui ensanglantent quotidiennement la capitale du pays. Dans les rues du bidonville de son enfance, les femmes ne sont souvent qu’un sexe et un ventre pour mettre au monde des enfants sans lendemain. Alma a refusé de n’être qu’une proie, désirée mais méprisée. A 15 ans à peine, pensant échapper à cette fatalité, elle a épousé le clan des plus forts, poussée par un élan vital qui lui soufflait que mieux valait infliger la violence que la subir. Un destin comme celui de dizaines de milliers d’enfants du pays, sacrifiés sur l’autel de la violence et de la corruption généralisées. Alma a tué, participé à des viols et à des extorsions. Elle a connu les passages à tabac et la prison, est devenue femme au milieu d’un groupe de jeunes guerriers surarmés, tatouant son corps de signes indélébiles et gommant sa féminité en imposant le respect par la peur.
Ses choix lui ont couté la perte d’un enfant et une tentative d’assassinat quand elle a émis le souhait de quitter le gang. Aujourd’hui, toujours menacée par sa clique, elle se sait en sursis, mais tente de mener une vie paisible, avec son compagnon et un travail.
Elle commence à réaliser ce qu’elle a vécu et, sans doute pour la première fois, caresse des rêves d’avenir.
Alma a décidé de raconter son histoire pour dissuader d’autres enfants de se laisser embrigader. Et, sans doute, pour s’en sortir aussi .
« Que dire à tous ceux à qui j’ai fait du mal pour qu’ils me pardonnent, ceux à qui j’ai volé la vie d’un être cher. La seule chose que je puisse faire, c’est leur parler, avec le cœur et avec mes regrets qui sont sincères ».
Une rédemption fragile, longue, et qui ne tient qu’au fil de cette force vitale qui a toujours distingué Alma des autres. Même sur une chaise roulante.